Session Atelier : AGAR - Albert MEMMI

Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de Sfax

Dès l’abord le titre m’a vivement interpelée. Ignorant sa signification, j’ai voulu comprendre le lien entre le choix de ce titre et le contenu de l’œuvre. Agar désigne dans la Bible la servante que Sarah donne pour concubine à Abraham et qui a accouché d’Ismaël. Mais après la naissance miraculeuse d’Isaac, Hagar sera chassée avec son fils à la demande de Sarah.  C’est ainsi qu’elle devient étrangère, et, dans ce roman, c’est bien cette idée de l’étranger qui se projette aussi bien dans la figure de Marie que dans celle du narrateur.

Par la suite, j’ai aimé l’écriture d’Albert Memmi. Dans un style simple qui n’est pourtant dépourvu ni de procédés d’écriture -comme l’énumération, l’hyperbole, l’oxymore, l’ironie-, ni de description bien détaillée et d’analyse romanesque, l’auteur parvient à aborder des sujets complexes, notamment ce mariage mixte entre un juif tunisien et une catholique française : une alliance, qui n’a malheureusement pas pu réussir à cause des multiples divergences entre les conjoints, à part les différences touchant la religion, la langue et les traditions.

Aussi, l’isolement et l’enfermement de Marie m’ont profondément frappée. Marie a choisi la solitude et, se voulant elle-même « étrangère », elle a tout refusé dans le pays de son mari, son froid, son humidité, ses gens, sa cuisine et ses épices ; elle s’est montrée hostile à la famille de son mari et aux traditions juives et arabes. Affichant son indifférence et son irrespect, elle montre une attitude cynique, parfois même agressive et « sauvage » quand elle en parle, ce qui élargie la fissure dans le couple. Par ailleurs, de son côté, le narrateur, héros de son récit, opte lui aussi pour le silence. À maintes reprises, au lieu de parler avec Marie et de lui exprimer ses sentiments, il recourt au monologue où il lui arrive fréquemment de se poser des questions rhétoriques. Au fil des pages, la communication se réduit et s’estompe progressivement dans le couple. 

Une idée m’a spécialement émue est aussi celle du déchirement, car au moment où le narrateur a essayé d’amener sa femme à apprécier et à aimer son pays et sa famille, il s’est senti perdu et s’est retrouvé lui-même à la recherche de sa propre identité. 

De plus, j’ai trouvé extrêmement intéressant que cette œuvre traite des questions d’ordre socio-culturel, telles le refus de l’autre, ou encore cette distinction entre nous, les « Arabes », et « eux » désignant tout étranger, et plus particulièrement nos coutumes ,nous Arabes, qui peuvent parfois paraitre rétrogrades, comme par exemple relativement la question du retardement de la grossesse de Marie.

En somme, en lisant Agar, je ne me suis pas sentie totalement étrangère ; j’ai retrouvé mon identité culturelle dans de nombreux passages et dans plusieurs pages, ce que j’ai beaucoup apprécié et savouré.

                                                                                                                                                                                                                                         Asma BOUCHHIMA
                                                                                                                                                                                                                             asmabouchhima@gmail.com

Ajouté par Taïeb HAJ SASSI
Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de Sfax
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